CULTURE

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

Chaque mois de décembre, le verdict tombe. Une teinte, une seule, censée incarner l’air du temps. Certains la scrutent, d’autres l’ignorent, mais tous finissent par la voir s’infiltrer, subtilement ou avec éclat, dans la mode, le design, la beauté, la communication. Une couleur Pantone n'est jamais anodine. Elle murmure quelque chose de l’époque, une intuition devenue pigment. Mais comment une entreprise née dans l’ombre des imprimeries est-elle parvenue à ce statut quasi oraculaire ?

20/2/2025
Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

Faire passer la souris sur les mots cachés pour les lire
20/2/2025

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

Faire passer la souris sur les mots cachés pour les lire

Un nuancier devenu empire

Pantone n’a pas toujours été cette autorité mondiale du langage chromatique. À l’origine, c’est une modeste fabrique américaine de nuanciers pour l’industrie de la cosmétiques. En 1962, Lawrence Herbert en prend les rênes et invente un système révolutionnaire : le Pantone Matching System (PMS). Une promesse simple mais puissante : attribuer à chaque couleur un code unique, permettant à un graphiste new-yorkais et à un imprimeur tokyoïte de parler la même langue, celle de la nuance exacte.

Très vite, ce lexique de couleurs dépasse l’univers technique pour s’infiltrer dans la mode, la décoration, la publicité. Pantone devient une référence, une boussole chromatique qui traverse les disciplines et les continents.

Le rituel de la couleur de l’année

C’est en 2000 que la marque s’octroie un nouveau rôle : celui d’interprète des tendances mondiales. Chaque année, dans un lieu tenu secret, un cercle restreint de coloristes, designers et sociologues de l’image se réunit. Leur mission ? Déceler, parmi l’infinité des teintes, celle qui résonne avec l’époque.

Les indices sont multiples : l’ondulation des grandes tendances, les frémissements du marché, les bouleversements sociaux, la psyché collective. Le choix d’une couleur ne se limite pas à une simple préférence esthétique. Il est le reflet d’une dynamique culturelle, d’une énergie diffuse que Pantone capte et traduit en un seul pigment.

Une teinte qui infuse le monde

Ainsi naissent des couleurs devenues symboles. Living Coral (2019), explosion de vitalité dans un monde inquiet du numérique et du réchauffement climatique. Very Peri (2022), un bleu-violet inédit, audacieux, né de la nécessité de réinventer notre rapport au réel. Chaque année, le choix fait débat. Certains s’en emparent, d’autres s’en détachent, mais tous finissent par en être traversés, presque malgré eux.

Parce qu’une couleur Pantone n’est pas une simple teinte. C’est un prisme à travers lequel nous lisons le monde, souvent sans même en avoir conscience.

La couleur peut-elle réellement influencer notre perception du monde, ou n’est-elle qu’un simple artifice marketing ?

Derrière le choix de la couleur de l’année par Pantone, une question plus profonde se pose : le pouvoir des couleurs dépasse-t-il le simple cadre esthétique ? Depuis des siècles, les couleurs sont chargées de symboles et d’émotions, elles façonnent nos ambiances, influencent nos comportements, modulent nos perceptions. Mais dans un monde saturé d’images et de stratégies de marque, où commence leur véritable impact et où s’arrête l’effet de mode ?

La couleur est un langage silencieux mais puissant. Elle guide nos émotions, façonne nos décisions et influe même sur notre physiologie : le rouge accélère le rythme cardiaque, le bleu apaise, le jaune stimule la concentration. Pantone, en désignant la couleur de l’année, ne se contente pas de refléter une tendance : il l’amplifie. En l’imposant comme référence visuelle, il orchestre une diffusion à grande échelle qui finit par structurer nos préférences. Un bleu profond devient soudain la teinte du moment, un vert olive s’invite partout, du prêt-à-porter aux packagings. La répétition forge l’habitude, et l’habitude ancre la tendance dans notre quotidien. Mais ce pouvoir est-il authentique ou purement marketing ? La frontière est mince. Certes, une couleur peut résonner avec un contexte sociétal, mais sa médiatisation lui donne une force prescriptive qu’elle n’aurait peut-être pas eue naturellement. Pantone ne prédit pas l’air du temps, il le façonne, jouant avec notre regard jusqu’à nous faire croire que nous avons toujours eu envie de voir le monde à travers cette teinte précise.

À quel point notre rapport à la couleur est-il conditionné par la culture et l’époque ?

Notre perception des couleurs est loin d’être universelle. Le bleu, symbole de sérénité en Occident, est couleur de deuil en Iran. Le rouge, évocateur de passion en Europe, est associé à la prospérité en Chine. Mais au-delà de la culture, l’époque elle-même façonne notre regard. Les pastels acidulés des années 50 traduisent l’optimisme d’après-guerre, tandis que les tons terreux et organiques d’aujourd’hui reflètent une quête de retour à l’essentiel. Pantone s’inscrit dans cette dynamique. Ses choix ne sont jamais anodins : ils captent des courants déjà en mouvement et leur donnent un langage visuel commun. Mais en fixant une teinte comme repère annuel, Pantone influence aussi notre manière d’interpréter le monde, imposant à chaque époque une couleur phare qui devient, consciemment ou non, un symbole de son temps.

Une couleur Pantone a-t-elle déjà manqué son rendez-vous avec l’époque ?

Il arrive que certaines couleurs ne rencontrent pas le succès escompté. Serenity & Rose Quartz (2016), duo pastel prônant l’apaisement et la fluidité des genres, a semblé en décalage avec une époque marquée par la montée des tensions politiques et identitaires. Ultra Violet (2018), pourtant inspiré par l’imaginaire de Prince et Bowie, n’a pas réellement trouvé d’écho dans les tendances, trop difficile à intégrer dans la mode et le design du quotidien.

Si Pantone capte souvent les mouvements émergents, une couleur ne peut exister pleinement que si le contexte culturel et social lui permet d’être adoptée. Lorsqu’elle anticipe trop ou s’éloigne des préoccupations dominantes, elle risque de rester une intention plus qu’une réalité.

20/2/2025

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

L’ensemble des produits présentés dans cet article a été choisi en toute indépendance par la rédaction. Les prix affichés sont fournis à titre indicatif et sont susceptibles de varier. En passant par nos liens pour effectuer un achat, une commission d’affiliation peut nous être attribuée.

Un nuancier devenu empire

Pantone n’a pas toujours été cette autorité mondiale du langage chromatique. À l’origine, c’est une modeste fabrique américaine de nuanciers pour l’industrie de la cosmétiques. En 1962, Lawrence Herbert en prend les rênes et invente un système révolutionnaire : le Pantone Matching System (PMS). Une promesse simple mais puissante : attribuer à chaque couleur un code unique, permettant à un graphiste new-yorkais et à un imprimeur tokyoïte de parler la même langue, celle de la nuance exacte.

Très vite, ce lexique de couleurs dépasse l’univers technique pour s’infiltrer dans la mode, la décoration, la publicité. Pantone devient une référence, une boussole chromatique qui traverse les disciplines et les continents.

Le rituel de la couleur de l’année

C’est en 2000 que la marque s’octroie un nouveau rôle : celui d’interprète des tendances mondiales. Chaque année, dans un lieu tenu secret, un cercle restreint de coloristes, designers et sociologues de l’image se réunit. Leur mission ? Déceler, parmi l’infinité des teintes, celle qui résonne avec l’époque.

Les indices sont multiples : l’ondulation des grandes tendances, les frémissements du marché, les bouleversements sociaux, la psyché collective. Le choix d’une couleur ne se limite pas à une simple préférence esthétique. Il est le reflet d’une dynamique culturelle, d’une énergie diffuse que Pantone capte et traduit en un seul pigment.

Une teinte qui infuse le monde

Ainsi naissent des couleurs devenues symboles. Living Coral (2019), explosion de vitalité dans un monde inquiet du numérique et du réchauffement climatique. Very Peri (2022), un bleu-violet inédit, audacieux, né de la nécessité de réinventer notre rapport au réel. Chaque année, le choix fait débat. Certains s’en emparent, d’autres s’en détachent, mais tous finissent par en être traversés, presque malgré eux.

Parce qu’une couleur Pantone n’est pas une simple teinte. C’est un prisme à travers lequel nous lisons le monde, souvent sans même en avoir conscience.

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

Effet de mode auto-entretenu ?


C'est une approche délicate qui navigue entre influence réelle et phénomène d’auto-réalisation.

D’un côté, Pantone capte des tendances latentes. Son choix annuel n’est pas arbitraire : il s’appuie sur des observations fines des évolutions socioculturelles, technologiques et esthétiques. La couleur élue traduit souvent un état d’esprit déjà en gestation dans les industries créatives, qu’il s’agisse du design, de la mode ou du marketing. En ce sens, Pantone ne dicte pas, il révèle.

Mais de l’autre, il est évident que cette nomination fonctionne aussi comme un puissant levier d’influence. Une fois annoncée, la couleur de l’année est reprise par les marques, relayée dans les médias, intégrée dans des collections, des packagings, des scénographies. Le marché joue le jeu et transforme cette sélection en phénomène visible, presque incontournable. On assiste alors à un mécanisme d’auto-validation : ce qui était une tendance diffuse devient une vérité tangible, car l’industrie la rend omniprésente.

L’impact varie cependant selon les secteurs. En mode et en décoration, où le cycle des tendances est rapide, l’influence est plus directe. Dans d’autres domaines, elle reste plus conceptuelle, un guide d’inspiration plutôt qu’une directive absolue.

Alors, qui de la poule ou de l’œuf ? Disons que Pantone n’impose pas la couleur, mais lui donne une scène, et l’industrie se charge du reste.

La couleur peut-elle réellement influencer notre perception du monde, ou n’est-elle qu’un simple artifice marketing ?

Derrière le choix de la couleur de l’année par Pantone, une question plus profonde se pose : le pouvoir des couleurs dépasse-t-il le simple cadre esthétique ? Depuis des siècles, les couleurs sont chargées de symboles et d’émotions, elles façonnent nos ambiances, influencent nos comportements, modulent nos perceptions. Mais dans un monde saturé d’images et de stratégies de marque, où commence leur véritable impact et où s’arrête l’effet de mode ?

La couleur est un langage silencieux mais puissant. Elle guide nos émotions, façonne nos décisions et influe même sur notre physiologie : le rouge accélère le rythme cardiaque, le bleu apaise, le jaune stimule la concentration. Pantone, en désignant la couleur de l’année, ne se contente pas de refléter une tendance : il l’amplifie. En l’imposant comme référence visuelle, il orchestre une diffusion à grande échelle qui finit par structurer nos préférences. Un bleu profond devient soudain la teinte du moment, un vert olive s’invite partout, du prêt-à-porter aux packagings. La répétition forge l’habitude, et l’habitude ancre la tendance dans notre quotidien. Mais ce pouvoir est-il authentique ou purement marketing ? La frontière est mince. Certes, une couleur peut résonner avec un contexte sociétal, mais sa médiatisation lui donne une force prescriptive qu’elle n’aurait peut-être pas eue naturellement. Pantone ne prédit pas l’air du temps, il le façonne, jouant avec notre regard jusqu’à nous faire croire que nous avons toujours eu envie de voir le monde à travers cette teinte précise.

À quel point notre rapport à la couleur est-il conditionné par la culture et l’époque ?

Notre perception des couleurs est loin d’être universelle. Le bleu, symbole de sérénité en Occident, est couleur de deuil en Iran. Le rouge, évocateur de passion en Europe, est associé à la prospérité en Chine. Mais au-delà de la culture, l’époque elle-même façonne notre regard. Les pastels acidulés des années 50 traduisent l’optimisme d’après-guerre, tandis que les tons terreux et organiques d’aujourd’hui reflètent une quête de retour à l’essentiel. Pantone s’inscrit dans cette dynamique. Ses choix ne sont jamais anodins : ils captent des courants déjà en mouvement et leur donnent un langage visuel commun. Mais en fixant une teinte comme repère annuel, Pantone influence aussi notre manière d’interpréter le monde, imposant à chaque époque une couleur phare qui devient, consciemment ou non, un symbole de son temps.

Une couleur Pantone a-t-elle déjà manqué son rendez-vous avec l’époque ?

Il arrive que certaines couleurs ne rencontrent pas le succès escompté. Serenity & Rose Quartz (2016), duo pastel prônant l’apaisement et la fluidité des genres, a semblé en décalage avec une époque marquée par la montée des tensions politiques et identitaires. Ultra Violet (2018), pourtant inspiré par l’imaginaire de Prince et Bowie, n’a pas réellement trouvé d’écho dans les tendances, trop difficile à intégrer dans la mode et le design du quotidien.

Si Pantone capte souvent les mouvements émergents, une couleur ne peut exister pleinement que si le contexte culturel et social lui permet d’être adoptée. Lorsqu’elle anticipe trop ou s’éloigne des préoccupations dominantes, elle risque de rester une intention plus qu’une réalité.

CULTURE

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

20/2/2025
Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

Appuyez sur les mots cachés pour les lire
CULTURE

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

20/2/2025
Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

Appuyez sur les mots cachés pour les lire

CULTURE

Pantone et la couleur de l’année : l’onde chromatique d’une époque

24/3/2025
Clément Rigaud

Crédit photo : HERMES WRTW SS25

Chaque mois de décembre, le verdict tombe. Une teinte, une seule, censée incarner l’air du temps. Certains la scrutent, d’autres l’ignorent, mais tous finissent par la voir s’infiltrer, subtilement ou avec éclat, dans la mode, le design, la beauté, la communication. Une couleur Pantone n'est jamais anodine. Elle murmure quelque chose de l’époque, une intuition devenue pigment. Mais comment une entreprise née dans l’ombre des imprimeries est-elle parvenue à ce statut quasi oraculaire ?

Appuyez sur les mots cachés pour les lire

Chaque mois de décembre, le verdict tombe. Une teinte, une seule, censée incarner l’air du temps. Certains la scrutent, d’autres l’ignorent, mais tous finissent par la voir s’infiltrer, subtilement ou avec éclat, dans la mode, le design, la beauté, la communication. Une couleur Pantone n'est jamais anodine. Elle murmure quelque chose de l’époque, une intuition devenue pigment. Mais comment une entreprise née dans l’ombre des imprimeries est-elle parvenue à ce statut quasi oraculaire ?

Un nuancier devenu empire

Pantone n’a pas toujours été cette autorité mondiale du langage chromatique. À l’origine, c’est une modeste fabrique américaine de nuanciers pour l’industrie de la cosmétiques. En 1962, Lawrence Herbert en prend les rênes et invente un système révolutionnaire : le Pantone Matching System (PMS). Une promesse simple mais puissante : attribuer à chaque couleur un code unique, permettant à un graphiste new-yorkais et à un imprimeur tokyoïte de parler la même langue, celle de la nuance exacte.

Très vite, ce lexique de couleurs dépasse l’univers technique pour s’infiltrer dans la mode, la décoration, la publicité. Pantone devient une référence, une boussole chromatique qui traverse les disciplines et les continents.

Le rituel de la couleur de l’année

C’est en 2000 que la marque s’octroie un nouveau rôle : celui d’interprète des tendances mondiales. Chaque année, dans un lieu tenu secret, un cercle restreint de coloristes, designers et sociologues de l’image se réunit. Leur mission ? Déceler, parmi l’infinité des teintes, celle qui résonne avec l’époque.

Les indices sont multiples : l’ondulation des grandes tendances, les frémissements du marché, les bouleversements sociaux, la psyché collective. Le choix d’une couleur ne se limite pas à une simple préférence esthétique. Il est le reflet d’une dynamique culturelle, d’une énergie diffuse que Pantone capte et traduit en un seul pigment.

Une teinte qui infuse le monde

Ainsi naissent des couleurs devenues symboles. Living Coral (2019), explosion de vitalité dans un monde inquiet du numérique et du réchauffement climatique. Very Peri (2022), un bleu-violet inédit, audacieux, né de la nécessité de réinventer notre rapport au réel. Chaque année, le choix fait débat. Certains s’en emparent, d’autres s’en détachent, mais tous finissent par en être traversés, presque malgré eux.

Parce qu’une couleur Pantone n’est pas une simple teinte. C’est un prisme à travers lequel nous lisons le monde, souvent sans même en avoir conscience.

Un nuancier devenu empire

Pantone n’a pas toujours été cette autorité mondiale du langage chromatique. À l’origine, c’est une modeste fabrique américaine de nuanciers pour l’industrie de la cosmétiques. En 1962, Lawrence Herbert en prend les rênes et invente un système révolutionnaire : le Pantone Matching System (PMS). Une promesse simple mais puissante : attribuer à chaque couleur un code unique, permettant à un graphiste new-yorkais et à un imprimeur tokyoïte de parler la même langue, celle de la nuance exacte.

Très vite, ce lexique de couleurs dépasse l’univers technique pour s’infiltrer dans la mode, la décoration, la publicité. Pantone devient une référence, une boussole chromatique qui traverse les disciplines et les continents.

Le rituel de la couleur de l’année

C’est en 2000 que la marque s’octroie un nouveau rôle : celui d’interprète des tendances mondiales. Chaque année, dans un lieu tenu secret, un cercle restreint de coloristes, designers et sociologues de l’image se réunit. Leur mission ? Déceler, parmi l’infinité des teintes, celle qui résonne avec l’époque.

Les indices sont multiples : l’ondulation des grandes tendances, les frémissements du marché, les bouleversements sociaux, la psyché collective. Le choix d’une couleur ne se limite pas à une simple préférence esthétique. Il est le reflet d’une dynamique culturelle, d’une énergie diffuse que Pantone capte et traduit en un seul pigment.

Une teinte qui infuse le monde

Ainsi naissent des couleurs devenues symboles. Living Coral (2019), explosion de vitalité dans un monde inquiet du numérique et du réchauffement climatique. Very Peri (2022), un bleu-violet inédit, audacieux, né de la nécessité de réinventer notre rapport au réel. Chaque année, le choix fait débat. Certains s’en emparent, d’autres s’en détachent, mais tous finissent par en être traversés, presque malgré eux.

Parce qu’une couleur Pantone n’est pas une simple teinte. C’est un prisme à travers lequel nous lisons le monde, souvent sans même en avoir conscience.

Effet de mode auto-entretenu ?


C'est une approche délicate qui navigue entre influence réelle et phénomène d’auto-réalisation.

D’un côté, Pantone capte des tendances latentes. Son choix annuel n’est pas arbitraire : il s’appuie sur des observations fines des évolutions socioculturelles, technologiques et esthétiques. La couleur élue traduit souvent un état d’esprit déjà en gestation dans les industries créatives, qu’il s’agisse du design, de la mode ou du marketing. En ce sens, Pantone ne dicte pas, il révèle.

Mais de l’autre, il est évident que cette nomination fonctionne aussi comme un puissant levier d’influence. Une fois annoncée, la couleur de l’année est reprise par les marques, relayée dans les médias, intégrée dans des collections, des packagings, des scénographies. Le marché joue le jeu et transforme cette sélection en phénomène visible, presque incontournable. On assiste alors à un mécanisme d’auto-validation : ce qui était une tendance diffuse devient une vérité tangible, car l’industrie la rend omniprésente.

L’impact varie cependant selon les secteurs. En mode et en décoration, où le cycle des tendances est rapide, l’influence est plus directe. Dans d’autres domaines, elle reste plus conceptuelle, un guide d’inspiration plutôt qu’une directive absolue.

Alors, qui de la poule ou de l’œuf ? Disons que Pantone n’impose pas la couleur, mais lui donne une scène, et l’industrie se charge du reste.

La couleur peut-elle réellement influencer notre perception du monde, ou n’est-elle qu’un simple artifice marketing ?

Derrière le choix de la couleur de l’année par Pantone, une question plus profonde se pose : le pouvoir des couleurs dépasse-t-il le simple cadre esthétique ? Depuis des siècles, les couleurs sont chargées de symboles et d’émotions, elles façonnent nos ambiances, influencent nos comportements, modulent nos perceptions. Mais dans un monde saturé d’images et de stratégies de marque, où commence leur véritable impact et où s’arrête l’effet de mode ?

La couleur est un langage silencieux mais puissant. Elle guide nos émotions, façonne nos décisions et influe même sur notre physiologie : le rouge accélère le rythme cardiaque, le bleu apaise, le jaune stimule la concentration. Pantone, en désignant la couleur de l’année, ne se contente pas de refléter une tendance : il l’amplifie. En l’imposant comme référence visuelle, il orchestre une diffusion à grande échelle qui finit par structurer nos préférences. Un bleu profond devient soudain la teinte du moment, un vert olive s’invite partout, du prêt-à-porter aux packagings. La répétition forge l’habitude, et l’habitude ancre la tendance dans notre quotidien. Mais ce pouvoir est-il authentique ou purement marketing ? La frontière est mince. Certes, une couleur peut résonner avec un contexte sociétal, mais sa médiatisation lui donne une force prescriptive qu’elle n’aurait peut-être pas eue naturellement. Pantone ne prédit pas l’air du temps, il le façonne, jouant avec notre regard jusqu’à nous faire croire que nous avons toujours eu envie de voir le monde à travers cette teinte précise.

À quel point notre rapport à la couleur est-il conditionné par la culture et l’époque ?

Notre perception des couleurs est loin d’être universelle. Le bleu, symbole de sérénité en Occident, est couleur de deuil en Iran. Le rouge, évocateur de passion en Europe, est associé à la prospérité en Chine. Mais au-delà de la culture, l’époque elle-même façonne notre regard. Les pastels acidulés des années 50 traduisent l’optimisme d’après-guerre, tandis que les tons terreux et organiques d’aujourd’hui reflètent une quête de retour à l’essentiel. Pantone s’inscrit dans cette dynamique. Ses choix ne sont jamais anodins : ils captent des courants déjà en mouvement et leur donnent un langage visuel commun. Mais en fixant une teinte comme repère annuel, Pantone influence aussi notre manière d’interpréter le monde, imposant à chaque époque une couleur phare qui devient, consciemment ou non, un symbole de son temps.

Une couleur Pantone a-t-elle déjà manqué son rendez-vous avec l’époque ?

Il arrive que certaines couleurs ne rencontrent pas le succès escompté. Serenity & Rose Quartz (2016), duo pastel prônant l’apaisement et la fluidité des genres, a semblé en décalage avec une époque marquée par la montée des tensions politiques et identitaires. Ultra Violet (2018), pourtant inspiré par l’imaginaire de Prince et Bowie, n’a pas réellement trouvé d’écho dans les tendances, trop difficile à intégrer dans la mode et le design du quotidien.

Si Pantone capte souvent les mouvements émergents, une couleur ne peut exister pleinement que si le contexte culturel et social lui permet d’être adoptée. Lorsqu’elle anticipe trop ou s’éloigne des préoccupations dominantes, elle risque de rester une intention plus qu’une réalité.

Audacieux magazine
Défilés, expositions,
histoire des arts
par le biais des arts
et de la création.
This is some text inside of a div block.
This is some text inside of a div block.

Vous êtes anonymes

AUDA utilise des cookies pour améliorer votre expérience, personnaliser le contenu et soutenir le travail de sa rédaction grâce à des partenariats publicitaires. Nous ne revendons pas vos données et nous respectons votre vie privée. Vous pouvez choisir d’accepter ou refuser la publicité.

En utilisant ce site Web, vous acceptez notre politique en matière de cookies.
J'accepte
Je refuse
Revient bientôt